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Et si l'Afrique était un autre monde
Et si l'Afrique était un autre monde
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1 août 2007

Un voyage harassant

voyageAdjamé (commune populaire d’Abidjan), il est environ 10 heures 30 ce dimanche  29 juillet. La gare de car est noire de monde. Des autobus vont et viennent. Chargent et déchargent hommes et bagages. Les passagers montent et descendent. Certains attendent patiemment quand d’autres commencent à s’énerver : «le départ était prévu pour 10 heures et depuis rien, personne ne nous renseigne et nous sommes livrés à nous même», dénonce en colère Joachin Brou, étudiant. Il part à Yamoussoukro pour des raisons familiales. Il semble être le plus pressé. Car autour de lui les autres passagers attendent calmement que le ton du départ soit annoncé.

A l’intérieur de la gare, un embouteillage se crée. «Il y a beaucoup de mouvements aujourd’hui à cause de la cérémonie de la ‘‘flamme de la paix’’ qui aura lieu demain (lundi 30 juillet) à Bouaké», informe Abdoulaye Sangaré, la quarantaine, chargé de la sécurité de la dite gare.

Une heure plus tard quelqu’un crie «Yamoussoukro montez !». Cet appel crée un grand cafouillage. Chacun voulant obtenir les meilleurs sièges – en ne tenant pas comte bien entendu des numéros de siège inscrit sur le ticket du car.

Une fois dans le car les causeries vont bon train. Le sujet général reste Bouaké. La quasi-totalité des passagers part dans la capitale de la vallée du Bandama. «C’est un évènement à ne pas rater. Et nous voulons être tôt à Yamoussoukro afin de pouvoir nous reposer. Ensuite nous nous rendrons le lendemain matin à Bouaké», précise Juliette Yapi, couturière. Elle est accompagnée de son fiancé.

12 heures, l’atmosphère dans le car devient insupportable. Tous les passagers se plaignent. «Cela fait presqu’une heure que nous avons embarquez. Et depuis il n’y a aucune trace du chauffeur. C’est de la foutaise tout simplement», crie un passager visiblement très énervé.

30 minutes plus tard, les passagers sont invités à embarquer dans un autre car. Injures et jurons, malédictions et menaces sont lancés à l’endroit du porteur de la nouvelle. Le ‘‘déménagement’’ se fait dans un vacarme sans précédent. «Tout le monde ne peut pas descendre à la fois. Allez-y en ordre», suggère une dame assise au milieu du car. Mais personne ne semble l’entendre. En fin de compte, les uns et les autres arrivent à sortir du car et à se mettre devant le ‘‘nouveau’’ «immatriculé 1017…», comme l’annonce la speakerine dans les hauts parleurs. Elle également essuie les injures – grossières – des passagers exaspérés.

13 heures 55, le moteur de car vrombi à la satisfaction des occupants qui sont bien plus calmes que dans le véhicule précédent. Le nouvel engin dans lequel le voyage se fera est un gros bus d’environ 70 places, avec des sièges dont le confort vous donne sommeil aussitôt assis.

Une quinzaine de minutes après 14 heures le car sort de la gare. «Ouf… Enfin… c’est pas trop tôt…», lance de part et d’autre les passagers. Mais c’est un soulagement qui sera de courte durée.

Une affaire de … ‘‘pièces’’

Depuis une dizaine de minute, le car c’est arrêté au corridor nord d’Abidjan. «Certains des passagers sont en situation irrégulière vis-à-vis de leurs pièces d’identité», annonce un agent de police commis à la tache du control des identités des occupants du car.

Au poste de police situé au corridor de vives discussions s’engagent souvent. «Ils nous demandent de leurs donner nos pièces. Ensuite, ils trouvent que ce n’est pas complet. Pour cela nous devons donner une ‘‘pièce’’, précisément une pièce de 500 francs», notifie Matthieu Tapsoba, de nationalité burkinabée. Chaque passager en situation irrégulière paie donc une «pièce» et tout rentre dans l’ordre. Mais pour combien de temps ?

Le car roule en direction de la capitale politique depuis une trentaine de minute. A l’intérieur certains bavardent à haute voix. D’autres cependant dorment profondément.

Vers 15 heures, le car s’arrête de nouveau. Cette fois ci c’est à proximité d’un village : «Elubo». Des marchands crient à tue tête, d’autres courent au risque de tomber. Ils proposent nourritures – de tout genre – eau, habits, carte téléphonique etc. Dans ce village situé à environ 70 Kilomètres d’Abidjan se trouve le premier barrage de police hors d’Abidjan. Le scénario ne changera pourtant pas. Les pièces d’identité seront demandés par le policier et au demeurant – pour ceux qui ne sont pas en règle – il sera réclamé des pièces d’argent.

Le spectacle sera le même à l’entrée de Toumodi.

Chaque arrêt du car pour un control donne lieu à un vif débat dans le car. «Moi j’ai toujours dit que ça ne changera jamais cette histoire de corruption», lance à haute voix une jeune fille, la trentaine environ. «Mais pourquoi oser voyager si on a pas ses papiers au complet», rétorque un sexagénaire. Il semble cautionner les actes des «contrôleurs».

Le car continuera à rouler pendant deux bonnes heures en plus. Marquant des arrêts de control à plusieurs villes.

Il est exactement 16 heures 53, un tonnerre d’applaudissement réveille les passagers endormis. «Que se passe t-il», demande une fillette à sa mère. «Nous sommes enfin arrivés à Yamoussoukro», lui répond cette dernière. Dehors l’on aperçoit les vastes rues de la capitale politique, avec ses réverbères joliment alignés.

Les passagers sont tellement en joie qu’ils ne peuvent s’empêcher de chanter et de jubiler. Certains ne manque pas de remercier Dieu à haute voix. Réaction normale, après un voyage si épuisant.

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